Vous avez dit « photographe » ?

Attention, c’est long, mais prenez le temps de le lire !

Qu’est-ce qu’un photographe ?

Fort d’une certaine naïveté, j’ai toujours pensé que pour être photographe, il fallait savoir faire des photos. Faire des photos n’étant pas seulement réaliser l’acte de déclencher, mais aussi de savoir utiliser les paramêtres techniques pour concevoir l’image, lui faire dire ce que l’on veut qu’elle dise, mettre en valeur le sujet photographié par le biais d’une technologie mise en pratique. Vient ensuite la psychologie humaine quand il s’agit de portrait, de gens, et puis l’éclairage, naturel ou non.

J’étais vraiment naïf.

Lors du salon de la photo, j’ai assisté avec un certain nombre de photographes, à un échange entre un photographe connu, ayant travaillé pendant 25 ans chez Harcourt, un des derniers lieux faisant réver certains photographes et surtout le grand public non photographe, nos clients potentiels.

Il nous a expliqué sa vision de son travail avec quelques anecdotes, des histoires de rencontres avec des gens connus, des acteurs, qu’il a photographié tout au long de ces années. Le tout en nous expliquant qu’il n’avait aucune connaissance en photo. Que la technique photographique n’avait aucune importance dans ses images.

Il est bon que ce fauxtographe ait travaillé au sein d’un studio, dans un environnement toujours similaire où il a pu mettre en place ses éclairages car, à défault d’être un photographe, il est un éclairagiste hors pair et il a du charisme lui permettant de détendre les gens face à l’appareil.

Dans le monde du cinéma, être éclairagiste n’est pas un métier sans gloire. La lumière est une part importante, sinon primordiale dans le monde de l’image. Les ambiances sont réalisées avec ces éclairages qu’un technicien de haut niveau, l’éclairagiste, fabrique pour créer ces atmosphères.

Être photographe, cela commence avec avoir un appareil et faire des photos. Même en mode tout auto. N’est il pas temps de nous ré-approprier un terme nous différenciant du photographe lambda ?

Nous ne pouvons pas, vis à vis de l’état, nous proclamer photographe professionnel. Cela est interdit de vouloir légiférer sur un statut professionnel. N’importe qui peut être photographe, restaurateur, électricien, sans aucune connaissance sur le domaine.

Il est temps que la profession sache se différencier et permette d’identifier un photographe professionnel, dont c’est le métier, qui en gagne sa vie, qui est apte, par une maitrise de la technique, à savoir imposer un ressenti à une image, à savoir placer une personne pour la mettre en valeur, à savoir trouver l’angle qui permettra à un bâtiment d’être mis en valeur, à savoir photographier la côte de bœuf, en  donnant cette envie à celui qui regarde l’image de la manger.

Il est temps de trouver un titre qui permettra de regrouper ces professionnels et de les statuer sur leur spécialités, même multiples, pour qu’on arrête d’entendre quand on se présente : Bonjour, je suis le photographe ! Bonjour, mon tonton aussi il est photographe, il a un iphone !

Le GNPP Ile de France réfléchit à cela car l’identification de notre métier est un point important dans notre communication vers nos clients. Nous y réfléchissons car, à contrario de ce que me disait un collègue, président de région, m’accusant de vouloir créer un syndicat alors que je suis déjà au GNPP, je rappèlerai que le GNPP Ile de France est un syndicat à part entière, comme tous les syndicats régionnaux regroupés autour du GNPP National et qu’il a vocation, depuis 1862, à défendre la photographie professionnelle et les droits des photographes professionnels. Le droit à l’identification est peut-être l’un des droits que nous avons trouvé le plus insignifiant depuis le début de la photographie car un pro s’identifiait auparavant facilement par son matériel et son savoir faire, nécessaire par le fait que chaque déclenchement avait un coût. L’arrivée du numérique a balayé tout cela en permettant à des appareils, et non plus des photographes, de faire des photos, techniquement bonnes, à zéro euro du déclenchement, permettant de fournir non plus une belle image mais une quantité significative d’image.

Bref, il est temps de réfléchir à cela, pas pour Noël, pas pour le nouvel an. Il est bon de voir ce qui sera présenté aux assises de la photographie de fin janvier sur le développement de la photographie, ses prévisions d’avenir, ses problèmes identifiés clairement et là, il faudra se mettre au travail pour tenir notre place dans le monde à venir.

Dans l’industrie, il y a eut 4 révolutions : la machine à vapeur, permettant le début de l’industrialisation, puis l’arrivée de l’électricité, au XIX siècle, l’automatisation au XX siècle et maintenant, la plus important arrive, l’interconnectivité des machines, produits, utilisateurs…

En photo, nous avons eu un développement similaire, l’invention de la photographie étant notre point 1, notre première révolution. Le film souple étant notre deuxième révolution, la couleur notre troisième et le numérique notre quatrième révolution. Il ne s’agit plus maintenant de passer de la Révolution 1.00 à la 2.00, mais nous devons comprendre et maîtriser la révolution 4.00 de la photographie car nous sommes en plein dedans. De grandes marques ont disparu, des marques indétronables, et pourtant… devons nous disparaître en nous diluant dans un ensemble de fauxtographes dont la différenciation se fera non plus par le savoir-faire et la sensibilité mais par la marque et le modèle de leur appareil ? Un grand chantier se prépare, et non pas une sélection. Il va falloir accompagner ces nouveaux photographes qui veulent vivre de la photographie et qui sont en manque de savoir faire, de savoir être. Il va falloir les inviter à nous rejoindre, à les former, à les éduquer sur les règles à respecter pour pouvoir gagner sa vie, et défendre son travail et l’image de son métier. Ce n’est pas une guerre contre l’auto-entreprenariat, pardon, la micro-entreprise. C’est un rattrapage de ce que nous avons raté, nous, les professionnels en place, d’accueillir et de faire grandir ces gens qui nous envient notre métier.

J’attends vos retours dans les commentaires, même désagréables.

Stéphane Riou
présidence du GNPP Ile de France

4 réflexions au sujet de « Vous avez dit « photographe » ? »

  1. Bonne idée d’ouvrir les lectures d’images à des photographes extérieurs.
    Pour la préparation des PDF, je ne suis que PDF « de base », et ne me sens pas légitime pour organiser cela. Ne serait il pas préférable que tu demandes à un PDF Honneur ou Excellence ?

  2. Dans le cadre d’actions concrêtes, il serait plus judicieux de permettre des lectures d’images, ouvertes à des photographes extérieurs au groupement, et pas spécialement pour l’organisation de tel ou tel concours. La journée de formation-information de décembre, prévue en réunion de bureau, est reportée pour pouvoir mettre cela en pratique, en plus d’une formation technique pratique et d’avoir un intervenant extérieur de qualité. Participer à un concours se doit d’être une démarche personnelle pour l’inscription, même si il est tentant pour un groupement régional de dire j’ai tant de présenté, et il peut être bon d’avoir des tuteurs dans le cadre des portraitistes de France, concours où des règles de base sont à respecter pour optimiser les chances d’avoir le titre. Tu es, contrairement à moi, Portraitiste de France. Veux tu organiser ces rencontres pour les portraitistes de France ?

  3. En terme d’actions concrêtes pour inciter les photographes en cours de professionnalisation à nous rejoindre, que dirais tu d’accompagner nos adhérents à présenter un dossier Portraitiste de France, et à organiser des rencontres où ils pourraient présenter les dossiers en cours de constitution et faire critiquer leurs images par des portraitistes primés ?

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