Amateur ou Pro ?

Bonjour,

J’ai eu une discussion avec un bon copain hier, photographe amateur, en magasin, où il me parlait de photos qu’il avait faite d’amis, qu’il avait traité les images avant de leur donner les fichiers retravaillés mais de manière à ce qu’ils puissent faire ce qu’ils voulaient dessus. Ce à quoi je lui ai répondu : pourquoi ne leur donnes tu pas un tirage finalisé simplement ? C’est ton image, ta vision, ils n’ont pas à la modifier et de plus, un fichier, c’est du virtuel quelque part. Il m’a répondu : je ne suis pas professionnel.

Quelque part, en tant que photographe professionnel, j’ai aimé cette réponse laissant entendre que le professionnel fait un tirage, livre une photographie sur papier, mais pas l’amateur.  En tant que revendeur de tirages photographiques grand public … j’ai moins aimé.

A partir de cela, je vais dériver un peu …

Hormis le corporate, ou les entreprises ont besoin du fichier pour intégrer les images dans leur communication, ou les photographies de CV pour intégrer la photo sur le CV et les réseaux sociaux, quel est le besoin réel pour le client final d’avoir le fichier ?

En règle général, une seule réponse : les mettre dans leur téléphone, la tablette, voir sur la télé, ou l’écran de l’ordinateur. De temps en temps faire faire quelques tirages, pas trop chers, sur des bornes qui recorrigent automatiquement le fichier, détruisant ainsi le travail du photogaphe et présentant une mauvaise image de son travail.

Oui, mais le client les demande !

Devons nous donner des fichiers haute définition, quitte à lui permettre de refaire un post traitement complet de NOS images ? Et oui, un photographe est un auteur et ce sont avant tout nos images, même si le client est dessus.

Qui dit auteur, dit droit d’auteur ! Le droit d’auteur facture une image en rapport à son utilisation : un magazine, le nombre d’exemplaire édité, la taille dans la page … Les artisans réalisent une photo pour un usage personnel, non publié, à usage unique et dont les utilisateurs n’en gagneront pas d’argent. La photo pour une entreprise sera déjà différente en terme d’usage, de même la photo pour les réseaux sociaux qui correspondent à de la publication.

Devons nous mieux valoriser la prestation de prise de vue et de création, et minorer nos prix de retirages, généralement aptes à décourager le client de faire des tirages chez nous ?

Devons nous avoir deux catégories de tirages ? Papier d’art et papier photo ordinaire ?

Oui, mais le client les demande !

Je sais, je me répète, mais le client vient avant tout demander une photographie quand il vient chez un photographe !

Dois je accepter de faire des remises, de faire des cadeaux, de faire du gratuit aussi simplement parce que mon client le demande ?  Certainement pas !

Il peut être agréable de faire du gratuit, cela fait souvent plaisir au photographe qui accepte de le faire, c’est agréable de « rendre service », de faire du social. C’est bon pour l’ego PERSONNEL du photographe, mais le photographe, souvent , c’est aussi l’Entreprise! L’Entreprise a t’elle les moyens et le devoir de faire du gratuit, juste pour le plaisir ? Avons nous si peu de demande qu’une photo, même gratuite, nous donne l’illusion d’être photographe professionnel, alors qu’au contraire …

Maintenant, fournir les fichiers peut être un choix économique d’éviter la perte de temps de la vente et de la réalisation de tirage, mais en ne gardant aucun contrôle de ce qui pourra être affiché au mur avec notre nom dessus.

Aussi bête que peut sembler cette remarque, elle est l’un des points importants sur les questions à se poser sur la photographie et cela ramène à une autre question primordiale :

Etes vous des techniciens de la photographie, dont le travail est fini à la livraison des images, images que, une fois livrées, vous effacez de vos disques durs car elles n’ont plus d’utilités à être gardées, même pour vous, ou êtes vous des artistes, sans exagération, dont chaques images porte un peu de vous en elle …  C’est un choix de métiers.

Il est certainement temps de se poser des questions sur les schémas  de valorisation de notre profession, sur la manière de facturer, de comment facturer tel ou tel type de prestation, de « que livrons nous à nos clients ? « . Il ne s’agit pas de faire une entente sur les prix, interdite par la loi, mais de bien réfléchir au comment facturer, que facturer, afin de redonner un peu de clarté et certainement de rentabilité à nos entreprises.

J’avais prévenu que j’allais m’éparpiller, mais, à bien y réfléchir, pas tant que cela.

Stéphane Riou
présidence de la Chambre Syndicale de la Photographie Professionnelle (C.S.P.P.)

10 réflexions au sujet de « Amateur ou Pro ? »

  1. Lors d’une dernière formation que j’ai donnée sans mon studio ( formation Immersion) j’insistais sur le fait de livrer des produits finis ( tirages, albums etc) et un stagiaire (photographe professionnel) m’a répondu je suis photographe et pas imprimeur … Ouch …

  2. Il y a peut être une solution;
    Si les amateurs se compare avec les professionnels, c’est aussi parce que beaucoup de professionnels font du travail d’amateur… Voyez ou je veux en venir… ?

  3. Ces réflexions sont intéressantes. Et si avec tout cela on offrait en plus la séance de prises de vues ! Je plaisante bien évidemment. Quand je vais à l’opéra, on ne m’offre pas ma place en espérant que j’achèterai le programme ou le dvd 😤

  4. merci de cette réponse. Personne n’a la solution car cela ne peut être qu’une solution discutée, ensemble. Depuis des décenies, chacun fait son système dans son coin. Des fois ça marche, des fois non, mais dans l’ensemble, la profession vit en dessous de ce qu’elle devrait dégager. Nous devons, en plus d’être photographe, acquérir une stature d’entreprise, de commerciaux (des vraix avec des objectifs), de communiquants (communication réfléchie et ciblée). Pour la communication vers le particuliers, on en reparle en septembre, cela arrive.

  5. Bonjour Stéphane,
    sur le fond je partage ton point de vue. Apres dans mon département (06) a la louche plus de 80% des photographes livre uniquement du numérique dans le domaine du portrait et du mariage. Il faudrait peut être leurs envoyer par email cet article 😉 Sans parler du fait que souvent en plus d’une sélection retouchée ils livrent les bruts.
    Perso dans mes séances portraits il y a un nombre de portrait à choisir qui est imprimé soit en tirages soit en livre + la version numérique de la cette sélection.
    Pour les mariages il y a un livre également. Je fais de la résistance mais c’est pas toujours évident. !! Et comme vienne pas me dire « ils dureront pas » car certains sont là depuis quelques années.

    Il faut en effet faire bouger les choses. C’est facile a dire, mais…. j’ai pas la solution.
    Me revient toujours une idée en tête quand on parle de sujet autour de la photographie professionnelle : Une communication d’envergure vers les particuliers

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